Les psychologues scolaires ont peur de disparaître

PARIS (AFP) - Les psychologues scolaires, confrontés à de plus en plus d'élèves en difficulté, estiment apporter un regard singulier sur les problèmes des jeunes, mais redoutent de voir leur profession disparaître.

Françoise Dalia est psychologue en écoles maternelle et élémentaire à Pau. Elle vient en aide à des élèves qui n'arrivent pas à apprendre, qui ont des problèmes de comportement ou dans leur famille.

"On essaye de repérer les élèves en difficulté lorsqu'on les reçoit en entretien", explique-t-elle à l'AFP. "Certains ont des problèmes d'inhibition, ils sont très repliés sur eux-mêmes et ont des relations difficiles avec les autres."

"D'autres sont victimes de harcèlement de la part de leurs camarades. On les aide à ne pas subir et à sortir de leur position de victime pour être acteur", ajoute-t-elle. "Les soucis familiaux se reflètent aussi sur les enfants. Des inquiétudes à la maison (précarité, maladies, divorces...) peuvent se traduire par de l'agitation en classe."

Comme de nombreux psychologues scolaires, elle s'inquiète pour l'avenir de sa profession, en raison notamment de recrutements "dramatiquement insuffisants".

Samedi, elle participait à une journée de réflexion sur la place de la psychologie à l'école, organisée à l'initiative de plusieurs syndicats et associations.

Chaque psychologue travaille en général dans plusieurs établissements et reçoit des enfants qui leur sont adressés par les enseignants ou les parents d'élèves. En collèges et lycées, les conseillers d'orientation psychologues interviennent en plus dans des centres d'information et d'orientation (CIO) pour accompagner les élèves dans leur projet professionnel.

Mais d'après Daniel Tramoni, membre de l'Association française des psychologues de l'Education nationale (Afpen), "le vivier est en train de s'éteindre."

"Nous sommes un corps vieillissant et beaucoup de départs à la retraite ne sont pas remplacés. Nous sommes vraiment en danger", a-t-il déclaré à la presse.

Dans le second degré, où cinq départs à la retraite sur six ne seront pas remplacés pour des raisons budgétaires, la profession aura perdu la moitié de ses effectifs actuels (environ 3.500) d'ici à 2013, selon Catherine Remermier qui intervient dans le Val-d'Oise.

Selon elle, "on laisse de moins en moins de place au regard des psychologues sur les difficultés des enfants".

"Il faut différents points de vue, approuve Véronique Le Mezec de l'Afpen. Or l'Education nationale ne propose que des réponses purement pédagogiques aux problèmes des élèves".

Pour Nicole Marut de la Société française de psychologie, "la place du psychologue à l'école est très singulière. Nous avons une distance avec les enfants que n'ont pas les enseignants."

"Les profs font parfois appel à moi pour réguler des relations qui peuvent être tendues entre élèves, entre garçons et filles", explique Françoise Dalia. "Nous pouvons également apporter un regard spécialisé sur la scolarisation des enfants handicapés. Par notre travail, nous participons à leur bien-être."

L'école doit accueillir des élèves "dans des situations de plus en plus complexes", résument-ils dans un communiqué. "Comment peut-elle le faire sans l'apport des psychologues ?"

© 2011 AFP JEFF PACHOUD

Par Roland Gori, à lire dans Libération