PARIS - Les anesthésistes-réanimateurs lancent l'alerte face à la "pénurie" et à la "disparition" de médicaments "indispensables" qui menacent la sécurité des patients, selon la Société Française d'Anesthésie-Réanimation (SFAR).

"Aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités et d'anticiper ce que l'on voit arriver" comme "l'arrêt commercial pour raison économique touchant des produits indispensables et sans alternative", a déclaré jeudi à l'AFP le Dr Laurent Jouffroy, président de la SFAR.

"Qu'elles soient liées à des pénuries temporaires ou à la décision des laboratoires de cesser la fabrication, les ruptures de stocks des médicaments d'anesthésie-réanimation sont récurrentes depuis plusieurs années" et le phénomène "s'intensifie", s'insurge cette société savante avec le soutien de l'association de défense des malades Le Lien.

"Si l'on ne trouve pas de solution, le risque existe que l'on ne puisse plus réaliser d'anesthésie dans le cadre d'actes chirurgicaux ou diagnostics", ajoute son président.

Les ruptures de stocks concernent des médicaments utilisés par les anesthésistes-réanimateurs pour réaliser des anesthésies générales, locales ou péridurales (dont celles pour accoucher), sans oublier le traitement de la douleur, notamment lors de soins d'urgence.

Ainsi le thiopental utilisé depuis 1936, qui sert aussi au traitement des traumatismes crâniens graves ou de certains états de mal épileptique, a cessé d'être commercialisé par le laboratoire américain qui approvisionnait la France. Il y a eu des solutions de dépannage, mais "aucune solution pérenne n'a été trouvée pour le thiopental", déplore le Dr Jouffroy.

Les risques de rupture de stock touchent également la lidocaïne adrénalinée car le laboratoire propriétaire cesse la production ou encore le propofol, au prix dérisoire (moins d'un euro l'ampoule) qui a révolutionné l'anesthésie générale (utilisé dans 90 % de ces actes) et contribue à la sécurité des patients.

"On a même déjà eu une rupture de stock de paracétamol intraveineux (antidouleur), qui a duré 6 mois parce que le laboratoire fabricant n'avait plus reçu de matière première (le principe actif) pour le fabriquer", rappelle le Dr Jouffroy.

Il s'agit souvent de produits anciens, sûrs et peu coûteux -comme la plupart des médicaments d'usage quotidien en anesthésie-réanimation, et qui sont tombés dans le domaine public (génériques).

Dans bien des cas, il n'y a pas de produits de remplacement permettant d'assurer la même qualité de soins et/ou au même prix, insiste

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Le pire ennemi, c'est la résignation.
"les rêveurs -et les rêveuses- du jour sont des personnes dangereuses car elles peuvent jouer leurs rêves les yeux ouverts et les rendre possibles."

Par Roland Gori, à lire dans Libération